Classement Vuillemot :

Libres propos sur la compétition en 1997

Signe d'une institution maintenant bien établie, le classement permanent des compétiteurs de vol à voile français commence à se ressembler furieusement d'une année sur l'autre ; en relisant ce que j'ai écrit les années précédentes, je m'aperçois que depuis le début des années 1990 c'est une stabilité remarquable à quelques fluctuations près. La participation en est le meilleur exemple : 563 pilotes inscrits dans au moins un concours en 1997, c'est très exactement la moyenne des années 1990 à 1996, l'écart-type étant de 25 environ ; le classement, comme vous le savez, prend en compte 3 années ; au total 940 compétiteurs marquent des points dans cette édition (906 en 1990 et une pointe à 957 en 1995). Bien sûr on pourrait s'acharner à y déceler des tendances, mais je laisserai les inconditionnels des statistiques se reporter aux tableaux et autres graphiques pour ne pas trop vous assommer, et je vais m'en tenir à ce qui me paraît essentiel de ce classement et de la réalité qu'il traduit, celle de la compétition actuelle.

les cinquante premiers Le palmarès a lui aussi un petit air de déjà vu. Seul petit nouveau sur le podium, Jean-Denis Barrois accède la troisième place grâce à St-Auban (1er au Lavender et 2eme au Mondial) ; mais à 29 ans, il s'est déjà distingué il y a 3 ans en remportant la deuxième place du championnat d'Europe classe club à Slavnica (Slovaquie), seule une formule truquée (et un vainqueur sur Libelle Club trafiqué) l'ayant alors privé du titre ; il a donc certainement un bel avenir devant lui.

FrŽdŽric Hoyeau, champion du monde de Piwi et 3eme en Finlande, confirme sa seconde place obtenue l'an dernier ; il faut dire qu'il lui était difficile de gagner encore 2 places comme les deux précédentes années ! Il est quelque peu desservi par le manque d'opposition rencontrée en Turquie, sa victoire ne lui rapportant que 979 points, au lieu de 1000 (cas des 3 classes à St-Auban) car les pilotes les plus titrés, les anciens champions du monde de classe libre Centka et Gantenbrink, terminent 13e et 14e alors que seuls les 10 premiers rapportent des points à la cote de la compétition. Sans doute la finesse du PW5 a-t-elle dû surprendre ces habitués des grandes plumes... Mais ce n'est que partie remise pour Fred, car l'horizon se dégage pour lui : tous les prochains championnats internationaux prévus sont en plaine, son terrain de prédilection.

Champion du monde (et de France)

En tête du classement, ô surprise : Gérard Lherm, qui après une éclipse (toute relative, puisqu'il était 3e) de deux ans obtient son 7e succès pour la 15e édition de ce classement, seul de nos 4 champions du monde (depuis 1995) à être, dans la même période... champion de France, cette année en 15 m. On ne présente plus Gégé (c'est celui qui monte toujours sur le podium à côté de Pupuce) ; d'un championnat à l'autre, il maintient une régularité exceptionelle, sans prises de risque inutiles, donc sans victoires d'épreuves éclatantes, mais grignotant petit à petit ses adversaires. Au contraire, ses adversaires allemands à St-Auban ont joué - et perdu- un coup de poker hors de propos, à l'avant-dernière épreuve, alors qu'ils étaient en tête : ils ont d'ailleurs reconnu qu'ils n'avaient à s'en prendre qu'à eux-même (était-ce vraiment le résultat du travail de déstabilisation mené par les sorciers de l'équipe de France ?). A la dernière épreuve, trop confiant sans doute, mon espion à la ligne m'avait annoncé l'arrivée d'AA (numéro de concours de Gégé) un bon quart d'heure avant son passage réel ; la bonne nouvelle était propagée dans le monde entier via Internet deux minutes après, le temps de s'apercevoir que c'était en fait IAA, un danois, qui était arrivé ; finalement le résultat entre les trois premiers s'est joué à la minute près, au point que le suspense a duré jusqu'au dépouillement des boîtes noires... Evidemment, ç'aurait été plus simple d'attendre que les résultats arrivent par le réseau local (et de ne pas être accusé de concurrence déloyale) si le système avait marché comme prévu, mais il a fallu improviser (soit dit en passant, plus de 10 000 pages web et 500 e-mails par jour ont été distribuées par le serveur WGC 97 pendant la compétition) ; souhaitons que les championnats du monde reviennent vite en France, pour éviter que l'expérience acquise par l'organisation se perde (tiens, je croyais que tout avait été parfait ?). Toujours est-il qu'avec la retraite, Gégé va maintenant pouvoir consacrer tout son temps au vol à voile et, ayant pris goût au titre mondial, essayer d'en collectionner encore quelques-uns.
 
 

participation

Statistiques

Plus de 900 points :
20 pilotes (comme l'an dernier)

Plus de 700 points (sélectionables au championnat de France) :
215 pilotes (au lieu de 201, soit une hausse de 10 points environ du niveau)

Participation totale (1995 - 1997) :

968 pilotes au lieu de 974 en 1994 - 1996 (-6)
940 pilotes classés (plus de 0 points) au lieu de 944 (-4), dont :
- 33 fémines (+3)
- 177 moins de 25 ans (-8),
- 189 plus de 50 ans (+16)
à qui s'ajoutent 324 étrangers (-17)
2812 performances au total,
2300 performances par des français dont 731 performances en 1997 (834 en 1995 et 735 l'an dernier)

En 1997 uniquement :

563 pilotes (+24 par rapport à 1996, -37 par rapport à 1995)
551 pilotes classés (+44, -37), dont :
- 20 fémines (+7, +1),
- 106 moins de 25 ans (-17, -16)
- 109 plus de 50 ans (+32, +2)
plus 115 étrangers (-73, Lavender Glide compris)

Les écarts sont faibles entre les 3 premiers pilotes du classement et entre eux et leurs suivants immédiats G. Navas (très régulier : sa 4eme perfo est encore de 951 points) et les autres médaillés de St-Auban D. Hauss, J.M. Caillard et J.C. Lopitaux ; ils sont 7 ˆ plus de 950 points. Suivent L. Aboulin, E. Bernard (champion de France club), J. Henry, L. Moreau, E Napoléon et E. Soubrier (champion de France standard). On se reportera au classement plus complet sur Minitel (3615 FFVV) ou sur Internet (http://wwwperso.hol.fr/~vav ; ). Signalons néanmoins quelques cas particuliers.
   

Féminines :cotes

1ere Claire Luyat Challes 890 points
NC Jutta Sturm Colmar 766,6
2e Christine Wodey Colmar 758
3e Eva Cros Colmar 748,8

Moins de 25 ans :
1er Emmanuel Lecomte Poitiers 908 points (+17,4)
2e Philippe de Péchy Rennes 889,2 (+50,4)
3e Olivier Darroze Villefranche 880,8 (+19.6)
aura plus de 25 ans en 1998...

Tout d'abord, "Napo", le champion du monde 1993 et 1995 (cette dernière perfo comptant encore cette année, mais ne l'empêche pas de chuter à la 12e place), pour qui St-Auban a été Trafalgar à cause d'un écart de quelques centaines de mètres à peine au départ d'une épreuve. Des incidents aussi lourds de conséquences, il y en a sans doute déjà eu avec les appareils photos classiques, mais là, ce sont 20 pilotes qui ont commis la faute en deux épreuves successives. Alors, facile, le GPS ? Etendue à 6 km de large, la ligne paraissait pourtant bien plus facile à négocier qu'aux précédents championnats (lors de la première utilisation du GPS il y a deux ans, il y avait un couloir alambiqué à respecter au départ). Eh bien oui, trop facile même, mais en apparence seulement : en ambiance de compétition, surtout à ce niveau mondial, l'attention va à l'orage qui tangente le point de départ, aux rivaux (ou aux suiveurs), et on néglige de vérifier le relèvement exact. Les impressions sont trompeuses, la boîte noire est sans pitié, et l'erreur détectée au mètre près : il faudra impérativement adapter le règlement pour éviter que le vol à voile perde sa primauté (ou que les pilotes, le nez dans leurs écrans, ne se percutent). Des pénalités dissuasives mais progressives devraient éviter le zéro pointé pour un mètre de travers.
 

Benjamins :

Pour une fois ils ne viennent pas du Nord mais du régional junior de Grenoble, où ils ont fait 5e et 8e  : Thomas Bertanier, suivi de peu d’une benjamine, Adèle Schramm, 17 ans tous deux et du club de Challes


Récidivistes :

1er Lherm 16 concours en 3 ans 5 en 97
2e F. Fanutza 13 concours en 3 ans 5 en 97
3e René Bernard 12 concours en 1995/1996

Jean-Marc Caillard, lui, a commis la même erreur, comme ses 2 coéquipiers, mais n'a par chance perdu que quelques centaines de points (une paille, quand on a sa classe !) : il n'y a pas de justice. Son titre mondial en standard ne lui vaut "que" la 6e place, car ses autres performances ne dépassent pas 900 points (Romo 1997). Mais il me pose un problème tout différent : sélectionné de la dernière heure, il rompt la belle harmonie de ses huit coéquipiers qui se trouvaient être, parmi les concurrents du Lavender Glide, les huit mieux classés au Vuillemot 1996 (le neuvième étant votre serviteur !), "Chacha" n'y étant que 28e. Preuve s'il en était besoin que tout système mathématique a ses limites, car je ne revendique nullement l'utilisation du classement comme critère principal de sélection, même s'il peut conseiller utilement le sélectionneur : il a l'avantage ne ne pas retenir seulement les places obtenues mais aussi l'écart de points par rapport au premier, ce qui fait par exemple que Didier Hauss devance Caillard grâce aux 998 points que lui valent sa 2ème place (une seule pompe, littéralement, le séparait du titre suprême...) et à une meilleure deuxième perfo.

Plus loin, on peut souligner la performance d'un nouveau venu à la compétition puisqu'il n'est dans mes tablettes que depuis cette année et qu'il surgit d'emblée à la 31e place grâce à trois compétitions en 1997, dont une victoire à Romo : il s'agit de François-Louis Henry, de Beynes, qui a de qui tenir puisqu'il n'est autre que le père du célèbre Julien (dit Juju), brillant second d'Hoyeau à Inönü et lui-même fils du champion du monde 1965 ! Robert Prat (St-Gaudens) fait aussi un retour impressionnant en gagnant le régional de Nogaro et 586 places (57e) ; dans les 100 premiers ont également gagné plus de 100 places Jérôme Philippe (Beynes), Cédric Marzolf (Mulhouse) et Erwan Le Goff (Bailleau). Comme quoi le système permet une progression rapide à qui s'en donne les moyens.

ages

Les championnats de France

Voltige :

On prend les mêmes et on recommence : les 7 premiers sont dans un ordre inchangé.

1 D. Serres 960,9 points
2 S. Katona 959,7
3 A. Leroy 930,6
4 P. Albertini 928,7
5 E. Meyrous 907.4

Conséquence logique des succs internationaux obtenus cette année, le niveau des tout premiers est en hausse d'une quinzaine de points et 6 d'entre eux (contre 2 seulement l'an dernier) dépassent les 960 points fatidiques qu'on peut obtenir en championnat de France. La sélection en équipe de France donne évidemment une chance exceptionnelle d'améliorer son score au Vuillemot, mais ceci ne vaut qu'en cas d'excellents résultats, ne l'oublions pas. Le temps atténuera l'avantage de leurs exploits, mais ces pilotes seront difficiles ˆ battre au classement permanent pour deux ans encore. Cette année était un cas à part car les championnats du monde se déroulaient "à la maison" et en montagne ; le classement, qui en est en partie le reflet, est donc de ce point de vue biaisé.

L'anomalie est ailleurs : il s'agit du fait que des 11 pilotes sélectionnés cette année pour les championnats du monde, seuls 3 (Henry, Lherm et Navas) aient participé à un ou plusieurs championnats de France lors de ces trois dernières années (95 - 97) et l'ont d'ailleurs gagné au moins une fois. Je n'incrimine pas les autres, mais le processus de sélection devenu flou au fil des ans et dont la refonte s'imposait. A quoi bon en effet remettre son prestige en question en risquant une contre-performance quand la sélection peut être reconduite d'un championnat du monde à l'autre, étant donné le niveau atteint par l'équipe ? Du coup les candidats potentiels à la sélection sont démotivés et ne participent plus non plus au championnat de France ; quant à ceux qui n'ont pas encore le niveau mais que la confrontation avec ces champions prestigieux aiguillonneraient, ils perdent une occasion irremplaçable. Et seuls une poignée de pilotes dans chaque classe disputent vraiment le titre, ce qui accroît la différence de rythme, à défaut de niveau, entre championnats nationaux et internationaux : dans ces conditions, tout nouveau promu se verrait prendre une tôle par inexpérience. Ce phénomène se traduit d'ailleurs par la baisse de la cote, surtout sensible depuis deux ans en classe standard qui n'atteint pas 950 points, en-dessous de la classe club et loin des 960 possibles.

Bien sûr il n'est pas toujours possible d'enchaîner deux championnats de haut niveau la même année, mais la richesse du réservoir de pilotes français permet de faire deux équipes qui alternent d'une année sur l'autre, ce qui était le cas en 96 et 97 : pas d'excuse alors, si la règle est clairement édictée, pour ne pas repasser l'autre année au moins en championnat de France. Les nouvelles règles vont dans ce sens en réaffirmant l'importance du championnat de France (toutes classes confondues) et en instaurant des conditions de participation ; il suffit maintenant qu'elles soient appliquées, et que la pompe soit réamorcée, pour que la relève soit assurée dans les meilleurs conditions et que le championnat de France retrouve sa place de fête du vol à voile national.

De nouveaux types d'épreuves ?

A la base, il y a la coupe fédérale qui est déjà une émulation, à condition de lui redonner son intérêt par une meilleure diffusion des résultats. Il y a les rencontres amicales (inter-clubs ou régionales) qui pourraient être développées, comme cela a déjà été évoqué l'an dernier. Il y a aussi la possibilité d'imaginer de nouvelles façons de concourir en vol à voile : course contre la montre (par opposition au vols en paquets, par exemple en imposant à chacun une heure de départ différente), choix de points de virage en vol, courses itinérantes au long cours... l'arrivée du contrôle GPS (qui est maintenant presque aussi abordable qu'un photo-time) ouvre des possibilités insoupçonnées, et les instances internationales réfléchissent à de nouvelles philosophies en la matière ; le moment est décisif et chacun, à commencer par tous ceux qui ne sont pas encore venus à la compétition ou l'ont abandonnée parce qu'ils n'y ont pas trouvé leur plaisir, peut proposer (ou expérimenter) de nouvelles formules : le débat est ouvert.
 

  D. Flament, octobre 1997